Fêlures

Publié le par Mitzie

Rendez-vous en PMA lundi matin. Je me fais des films sans arrêt, par moments j'espère rencontrer une docteur idéale, gentille, une solution rapide, je me vois un gros ventre dans quelques mois, mais le plus souvent, j'imagine un dialogue de sourds, une incompréhension totale, un femme hautaine et sèche, des examens comme des épreuves. N'est-ce pas trop tôt ? Mettre un pied en PMA, ça me fait si peur. Je cherche à préparer les bons mots. Comment faire pour bien expliquer l'importance de ces saignements (pour moi, en tout cas), sans passer pour une folle, une chochotte ? J'ai peur de subir un tas d'examens (ça j'y suis prête), mais sans que rien soit trouvé, et qu'on nous propose une FIV dans trois mois, crac.
 
J'ai peur d'avoir ces caillots noirs qui sortent de moi toute ma vie, sans explication, et de finir par les haïr, par ne plus pouvoir les voir, par ne plus pouvoir utiliser cette partie de mon corps qui me trahit, de m'éloigner d'Ernest à cause de ça.
 
J'ai peur d'aller voir ce psy que des amis me recommandent et de le trouver décevant par rapport à tout le bien qu'on m'en a dit.
 
J'ai peur de ne plus être capable d'aller voir mes amis et ma famille à cause de tous ces bébés qui ne vont pas manquer d'arriver. Trois personnes de ma liste G sont en essais presque ostensiblement, et en parlent sans arrêt comme ça, comme si ça allait arriver dans deux mois, et ça sera sûrement le cas, et je leur souhaite, tout en étant jalouse. Ca me piquote aussi quand ma mère me rapporte leurs propos avec un si grand naturel. Elle n'a pas la moindre idée de ce qu'on souffre alors ? Ou bien elle essaie de me tendre des perches que je suis incapable de saisir, dans mon effort pour ne pas avoir l'air amère et jalouse ? Je lui en ai parlé quelques fois, de nos essais, de la déprime. Il y a presque un an maintenant. On n'en parle plus. Ni l'une ni l'autre n'avons su trouver les mots, apparemment. Par moments elle rejetait mes craintes, sans doute dans un effort pour me rassurer, et à d'autres elle me pressait d'aller consulter, dans un effort pour me donner du courage ?
Je n'en parle plus avec ma soeur non plus. Elle m'a fait comprendre que comme j'ai un mari, un chat et un appart, ça lui faisait mal que je me plaigne de ne pas avoir la cerise sur le gateau alors que son gateau vient de lui passer sous le nez. Je sens que tout le "retard" que je prend la rassure, en quelque sorte, compense le sien, et un jour on rattrapera toutes les deux et nos enfants pourront être des cousins du même âge. Je comprends ça, je réagirais exactement de la même façon.
 
Quand même, ça fait longtemps que je n'ai pas pleuré. Je suis plutôt un peu résignée. Minoute est adorable, on lui cherche une compagnie, parce qu'elle s'ennuie. Mais pas de chaton. Des fois je me dis que le fait qu'on préfère un adulte, parce qu'un chaton fait des bêtises, qu'on ne sait pas comment il va devenir plus tard, et tout ça, ça prouve qu'on n'est pas prêts pour avoir un enfant, pas prêts pour ces efforts, pour l'inconnu.
 
Pourquoi doit-on en passer par toutes ces questions ? Si j'étais tombée enceinte rapidement, comme toutes les autres, j'aurais fait les efforts, j'aurais affronté l'inconnu. Il y a quelques mois, je nous sentais si prêts, j'étais si sûre de moi, et puis maintenant ces questions viennent grignotter ma résolution, mes forces, mes idéaux. Est-ce qu'on s'est trompés ? De moment, de projet, de... personne ? Horribles pensées que je rejette de toutes mes forces.
 
Lâcher prise, oui, mais sans rien faire tomber au passage, ça serait pas mal.
 
Faut-il faire des efforts de visualisation, positiver, s'y voir déjà, faire la place au bébé à venir pour qu'il ait envie de venir ? Fichue idée que celle du troisième désir.
Faut-il arrêter d'y penser comme une obligation, se préparer à embrasser d'autres projets, pour que le renoncement éventuel ne nous tue pas ?
Arriver à faire les deux à la fois me paraît tenir de la prouesse, ou alors de la schizophrénie.
    

Elle est horrible cette photo, non ? Elle m'a tellement choquée que je l'ai mise.
   

Publié dans Trop de questions

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M
Pas de pb, c'est moi qui n'avait pas été claire :-).<br /> Je t'embrasse aussi ! (on se tutoie ? on doit avoir pas loin du même âge ?)
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M
Après relecture, je me rends compte que j'ai fait à peu près exactement ce que je déteste que l'on me fasse. LA REPONSE A LA CON : mais si c'est bien comme ca tu verra, au moins t'es sure de votre désir d'enfant et blablabla....Bien sur ce qui est douloureux n'est pas forcement la nature des questions mais le délai de réponse, l'incertitude, le fait d'avoir le sentiment de devoir faire un 100 m haies avec les deux pieds attachés et dans 50 cm de neige poudreuse...Comment se projetter, garder l'enthousiasme quand la visibilité que l'on à est à au mieux 28 jours. le cycle infernal!!Je me permet de vous embrasser tendrement
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M
Pas du tout obsolète, Marie, non :-)<br /> C'est bien sûr vrai qu'il vaut mieux se poser les questions avant, mais ces questions je me les suis posées depuis bien avant d'arrêter de prendre la pilule, et je pense que je suis aussi consciente qu'on peut l'être en théorie des difficultés qu'on va rencontrer.<br /> Après une réflexion de plusieurs mois on a DEJA décidé qu'on allait affronter tout ça en couple, et comme on n'est pas pire que d'autres je m'agace du sort qui me fait repenser mille fois à ces questions, et mettre tout en doute encore et encore.<br /> C'est idiot, et pour le coup, c'est stérile, ça mine ma résolution plus que ça ne la renforce... ce que je voulais exprimer par cet article mais apparemment ce n'était pas très clair !<br /> Moi je n'ai pas pleuré PENDANT le rendez-vous... mais j'en pleure encore... j'en parlerai certainement plus tard !
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M
Je réalise que maintenant, après ce premier rendez-vous, les lignes ont du bouger, comme on dit !Et que donc mon commentaire doit être un peu ... obsolète...
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M
Bien sur, horribles questions, mais comme le dit Anne, il est bon parfois de se les  poser AVANT!  Bien sur que l'on ressent de l'injustice de devoir faire face à ces horribles questions alors que d'autres tombent enceintes comme elles tombent d'une chaise.... Mais a voir des couples amis ou famille pour qui le bébé est arrivé tout de suite, ils ont du faire face à ces questions avec un bébé à nourrir, la nuit, le jour, à changer, la nuit, le jour, un couple à remettre en route, la nuit, le jour, etc...Il me semble que pour nous ces questions se résoudrons plus facilement (mais pas toutes seules hein!  ;-) ) puisque nous y sommes préparées. Parce que il faut se rappeller une chose dans cette douloureuse attente: nous allons avoir un enfant ! J'ai rencontré pour la première fois un médecin dans le but d'aller vers un parcours PMA, la semaine dernière, et même si j'ai passé le rendez-vous en larmes (les digues lâchent parfois), il m'a réconforté avec cette phrase : "de toutes façon vous aller avoir un enfant, par un procédé ou par un autre, vous aurez un enfant, il faut vous y préparer !"  He oui, sur cette longue route on perd parfois de vue l'horizon...Encore un fois, la lecture de ce blog m'aide énormémént, merci
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